#1 Carnet de campagne d’une libraire confinée

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Samedi, 20h, je suis encore dans le métro qui me ramène chez moi lorsque mon patron m’appelle pour m’informer que la librairie étant un commerce « non essentiel » aux yeux de notre gouvernement, elle fermera ses portes dès ce soir. Après avoir longuement pesé le pour et le contre, mon mari et moi décidons de nous exiler dans notre maison de campagne dès le dimanche, après nous être acquittés de nos devoirs de citoyen. Nos deux enfants de 7 et 3 ans ont beaucoup pesé dans la balance. Je dois vous avouer qu’en dépit des nombreux livres prônant l’éducation positive dont nous disposons à la librairie, je ne suis pas sûre de pouvoir les mettre en pratique très longtemps dans notre 60m2 parisien.
Cette maison avec jardin, à 3 heures de Paris, tient ses promesses. Elle nous permet de nous mettre au vert régulièrement et abrite nos meubles, la garde-robe de notre aînée qui sert à notre cadette, nos « effets personnels » comme on dit dont… nos livres !
Libraire depuis 20 ans, cela fait bien longtemps que je ne garde plus les livres que je lis. D’une part parce que je ne relis jamais ce que j’ai déjà lu, d’autre part faute de place, évidemment. Pourtant j’ai tout de même des étagères bien garnies. Celles et ceux qui nous ont déménagé peuvent en témoigner ! Il y a donc les livres de mon mari, travailleur de l’édition – nous faisons bibliothèques séparées – les premiers livres que j’ai acheté sur mes propres deniers, mes premiers services de presse et ceux que je lirai peut-être un jour… Lorsque je me retrouverais confinée chez moi, par exemple ?J’ai donc à disposition des livres dont plus personne ne parle (genre Superstars d’Ann Scott), ceux qu’en bonne libraire, j’aurais dû avoir lu (Le K de Buzzatti) et ceux qui ne me disent rien mais que l’on m’a offert (Le livre d’un homme seul de Gao Xingjian, prix Nobel de Littérature 2000). Je pourrais aussi piocher dans les bibliothèques de mon cher et tendre, gros lecteur d’essais historiques, de BD fantastiques et de fantasy, un rayon inexistant aux Buveurs d’encre si l’on omet les classiques de SF pure et d’anticipation et qui n’est pas un de mes domaines de prédilection, vous l’aurez compris. Bref, je ne sais par quoi commencer…

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