CORPS A L’ECART – Elisabetta Bucciarelli

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buciarelli Ce pourrait être un roman social tendance naturaliste qui nous mettrait le nez dans la boue, histoire de bien nous faire sentir l’état de décomposition dans lequel se trouve notre société. Ce pourrait être une simple métaphore puisque le théâtre de Corps à l’écart est une gigantesque décharge située dans une grande ville du nord de l’Italie, jamais nommée. La dimension critique est certes évidente mais le texte d’Elisabetta Bucciarelli a bien davantage à offrir au lecteur assez curieux pour s’aventurer dans une lecture dont le sujet semble a priori peu ragoûtant.

Corps à l’écart nous fait partager le quotidien d’un petit groupe qui survit illégalement si ce n’est incognito dans cette fameuse décharge. Corps à l’écart, corps invisibles parce qu’ils se cachent, corps immondes, littéralement. La Repubblica voit dans le roman  » »un regard désenchanté sur notre société contemporaine ». Pour ma part, j’y vois aussi un conte urbain où la tendresse n’est pas absente, la solidarité réelle entre ces hommes naufragés de la vie et les adolescents en rupture familiale qui sont les principales figures du roman.

La narration par très courts chapitres permet de faire alterner les scènes de vie dans la décharge et celles qui se passent dans l’univers familial de Silvia, fille de chirurgien esthétique et petite amie putative de Iac, l’un des gamins qui a élu domicile dans la décharge. Le contraste entre les deux mondes, celui où on répare les corps, celui où on répare les objets fonctionne admirablement et est à l’origine de belles trouvailles poétiques ou humoristiques. Des deux activités, la plus futile n’est pas forcément celle qu’on croit.

Corps à l’écart est un beau texte, empreint de beaucoup d’humanité dont j’espère qu’il obtiendra le succès public et critique qu’il mérite.

Traduit de l’italien par Sarah Guilmault

éditions Asphalte – 21 euros

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