Asterios Polyp a une cinquantaine d’années, une carrière d’architecte virtuelle, et se laisse aller : un soir, alors qu’il regarde des vidéos vautré dans son lit, c’est le coup de foudre. Au sens premier : son appartement part en fumée. Avec ce qui lui reste en poche, il quitte New York et se retrouve à chercher un job dans une petite ville. Il devient garagiste, s’installe chez l’habitant. Mais toutes ces rencontres ne font que le ramener à son passé.
Autant le dire tout de suite, Asterios Polyp est le chef d’oeuvre qu’on attendait pour boucler 2010, un livre beau à tous égards. Mazzucchelli prend un malin plaisir à vous montrer combien il dessine bien, et dans tous les registres : sa ligne claire élégante intègre des passages variés en aplats, au pinceau, des morceaux de comic strip, des envolées abstraites… sans parler des trouvailles de mises en page et du jeu des couleurs. Et sous ce vernis sophistiqué, qu’y a-t-il ? Un beau portrait d’homme, un original, un peu génial, un peu loser, un type qui se découvre au long court avec ses qualités et ses faiblesses. Le système des flashbacks s’équilibre bien avec le récit au présent, et l’intervention d’un autre narrateur offre des changements de perspectives réussis. Et les clins d’oeil de construction sont bien trouvés : Mazzucchelli aime à poser un détail à une page et à le récupérer cent pages après, comme un indice. En un mot donc, un bonheur d’intelligence dessinée.
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Fanny Soubiran
Casterman – 29,95 €